Des Aiguilles et des Costumes : l’imaginaire sous toutes ses coutures
Chère lectrice, cher lecteur, si tu te souviens, il y a quelques semaines, j’avais évoqué cette association dédiée au costume. En effet, celle-ci étant proche de l’association Steampunk, les Vaporistes nantais, je l’ai évoquée dans le même article. L’association était centrée plus généralement sur les costumes, et non sur un imaginaire en particulier. J’avais donc décidé d’y consacrer un article à part.
Reprenons donc du début : courant septembre, l’association et forum des Aiguilles et des Costumes organise un pique-nique costumé. Le mot d’ordre est « thème libre ». Très logiquement, je recroise plusieurs de mes comparses des Vaporistes Nantais, dans leurs tenues Steampunk de rigueur.

Je fais aussi la rencontre de tout une équipe de joyeux drilles, amateurs de cosplay. Je repère notamment plusieurs membres d’un groupe de cosplayers dédiés à Star Wars. Dans le même groupe, je croise un cosplay de Barley, dans En Avant. Il s’agissait d’une production Disney un peu passée en demi-teinte pour cause de coronavirus. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il fait sensation puisqu’il déclenche le fou-rire général en faisant peur à des enfants.

À cette occasion, j’échange une première fois avec Clémence, la présidente et secrétaire de l’association. Vêtue d’une robe début XXe et coiffée d’un canotier, elle annonce la couleur : gloire au costume. Vu le rôle d’une association dédiée aux costumes dans la culture de l’imaginaire, je lui laisse mes coordonnées et lui dis que je souhaite être prévenu des événements à venir.
Je tiens à préciser que si j’aime bien les costumes, je n’y connais pas grand-chose en couture ou en confection. Cependant, moi-même en recherche pour mon propre costume, et demandeur de conseils, j’observe ce que font les autres.
Le shopping créatif : chercher des idées de costumes, stimuler l’imaginaire
La dernière semaine de septembre, je reçois une invitation, via la page Facebook de l’association. L’événement s’intitule « Shopping créatif ». Dans un autre contexte, on aurait pu imaginer quelque chose d’axé autour de la mode, mais sachant qui organise l’événement, je me doute qu’il s’agit bien d’autre chose. Sans faire de manières, donc, je réponds présent à l’invitation. Sur place, je retrouve un de mes comparses des Vaporistes Nantais, autre association férue de costumes et d’imaginaire, et une fois l’équipe de départ constituée, nous n’avons plus qu’à commencer notre tour.
Autant certains articles ne m’intéressent pas vraiment, la mercerie, par exemple, autant j’ai apprécié une certaine originalité dans les boutiques retenues. Voici un petit tour d’horizon.
La Droguerie

Voici typiquement une boutique dont je ne suis pas client, et pourtant, j’admets ce qu’elle a de fascinant. Elle affiche une belle enseigne, décoration réalisée avec amour. Située rue de la Fosse (le vieux centre de Nantes), la boutique ne ressemble pas à une mercerie. Dans la même rue, on trouve une des entrées du passage Pommeraye, la chocolaterie Gauthier Debotté, et la librairie Coiffard. On a donc déjà un pied dans un autre monde, ou à tout le moins, dans une autre époque.

Et une fois dedans, un aspect me frappe : des dizaines de types de boutons et autres accessoires, entreposés dans des bocaux, eux-mêmes sur des étagères rétro-éclairées. Je pense à la confiserie Queen and King, que j’avais visitée quelques semaines plus tôt. Cette mercerie ressemble à une confiserie, si bien que même si la mercerie ne te passionne pas, l’ambiance ta rattrape. Vu le nombre conséquent de boutiques à visiter, nous n’y restons pas très longtemps, et passons au commerce suivant.
Pepette

Il s’agit d’une friperie, située quai Turenne. On passe devant sans la remarquer, et pourtant, une fois dedans, on entre dans un autre monde. Tu n’es plus en 2020, mais dans les années 70-80. Place aux vestes en daim, aux pantalons en velours côtelé et aux tissus à fleurs.

La boutique se divise en plusieurs salles, et si j’ai du mal à m’y retrouver avec l’organisation de leurs rayonnages, j’aime beaucoup la façon dont ils ont décoré les lieu. Certes, la boutique est pleine à craquer, et paradoxalement, cela lui donne quelque chose d’accueillant, de chaleureux. Clémence, à cette occasion, me fait part de sa passion pour les ombrelles, puisque plusieurs trônent fièrement sur les hauteurs des murs. Malheureusement, elles ne sont pas à vendre. Nous poursuivons donc notre tournée.
Chapellerie Falbalas St-Junien

On arrive dans une boutique qui m’intéresse déjà plus : une chapellerie. À l’angle de la rue de la Paix et de l’allée Flesselles, on peut difficilement la louper. D’ailleurs, je l’ai déjà visitée plusieurs fois, moi-même. Si tu as vu mon autoportrait, tu connais mon goût pour les chapeaux. Autant te le dire sans détours, la boutique avait tout pour me plaire en la matière. Mais comme la qualité a un prix, je n’ai rien acheté ce jour-là. Un chapeau Stetson coûte entre 80 et 150 € selon les modèles, et un Borsalino, près de 300. Donc cela attendra un peu… hélas. Et nous continuons donc dans le quartier du Bouffay.
Banga, mercerie du Bouffay
Comme je te l’ai dit, la mercerie n’est pas vraiment mon rayon (au sens propre et au sens figuré). Un tambour de broderie à oreilles de lapin retient l’attention de Clémence et de plusieurs autres filles du groupe. Personnellement, j’ai repéré des peluches tricotées à faire soi-même, et je m’attendris devant le côté mignon de la chose. Tu as peut-être déjà vu la photo sur mon compte Instagram, tu peux t’abonner, d’ailleurs).

Nous passons ensuite par plusieurs magasins d’antiquités situés autour du château. Clémence, ravie, fait une descente parmi les gravures de mode du début du XXe siècle. C’est, me dit-elle, son autre péché mignon, avec les ombrelles. Et finalement, une boutique retient mon attention, ainsi que celle d’Aude, des Vaporistes Nantais.
Galerie Fine Art
Située dans une cour, un peu en retrait de la rue, c’est une autre boutique devant laquelle je suis passé un nombre incalculable de fois sans jamais y entrer. J’avais retenu que c’était une galerie d’art. Ce que j’ignorais, c’est que le gérant de la boutique était aussi un passionné d’horlogerie, et vendait des montres anciennes. Aude avait besoin d’une montre, c’est donc très logiquement qu’elle a voulu aller voir ce que vendait la boutique.

Si les montres exposées ont leur âge, en regardant attentivement, on tombe sur de véritables trésors, et un commerçant qui sait très clairement ce qu’il vend. On va de la Lip revendue quelques dizaines d’euros à l’Omega à plus de 500. Pour cette dernière, quand on sait qu’une Omega neuve vaut au bas mot 2000 à 3000 €, on se surprend à trouver ça raisonnable. Passionné par les belles montres, je trouve à qui parler et Aude repart avec une montre à son goût. Et moi, je retiens l’adresse, en vue de m’offrir une très belle montre, à un prix abordable… un jour.
Ce qui ajoute à l’ensemble, c’est le lierre sur la façade du bâtiment. La boutique, elle, est à mi-chemin entre un bric-à-brac et un vieux salon bourgeois. Les lieux regorgent de véritables trésors, et les montres me font quasiment oublier les tableaux. C’est pourtant ce que vend ce commerçant à la base.
La Môme Vintage

Malgré mon enthousiasme dans la boutique Fine Art, je n’ai pas acheté de montre. Mais à La Môme Vintage, j’ai craqué pour une cravate cuivrée en soie. Celle-ci correspond très bien à l’esprit steampunk que je souhaite pour mon costume. Clémence, avec son shopping créatif, commence à me gagner à sa cause. Et son amie Eva, qui se vantait d’être le petit diablotin juché sur son épaule, semble commencer à bien aimer mon épaule à moi. Heureusement, je sais raison garder. Clémence garde les coordonnées de la boutique pour faire l’inventaire des gravures de mode qu’elle n’a pas, et nous poursuivons le tour.
La raffinerie Nantaise

C’était l’une des dernières boutiques par laquelle je suis passé. Là encore, si je n’ai rien acheté, l’esprit général fascine. Quand Clémence m’annonce une boutique spécialisée dans la retouche et le sur mesure, je m’attends à quelque chose de snob. Le gérant, plutôt décontracté, tutoie ses clients, et coupe vite court à cette appréhension. Outre la boutique de vêtements et l’atelier de retouches, la raffinerie Nantaise abrite aussi… un salon de tatouage, devant lequel tu passeras si tu vas dans la salle du fond. De nouveau, on trouve beaucoup de vêtements très élégants, pour hommes cette fois. Mais là encore, j’ai beaucoup de mal à trouver quelque chose qui m’aille.

J’évoquais les liens entre costumes et imaginaire ; ici, on se sent plongé dans une histoire de Sherlock Holmes ou de Rouletabille. La boutique joue sur une image rétro, mais on est loin de la connotation bourgeoise du sur mesure. Au contraire, la Raffinerie Nantaise joue plutôt une image de boutique pour mauvais garçons. En témoigne le recueil sur l’histoire du tatouage, qui est plutôt l’apanage des marginaux dans la France du début du XXe siècle.
Le credo de l’association : la passion pour tous les costumes, l’historique comme l’imaginaire
Le fait de faire les magasins peut paraître une occupation futile. Mais Clémence en a fait une occasion de partager sa passion pour le costume. Par exemple, j’avoue avoir souri quand je l’ai vue s’enthousiasmer sur de vieilles paires de bretelles. Puis elle m’a expliqué qu’à la Belle Époque, c’était ça, et non une ceinture, qu’un homme portait. Cela m’a renvoyé à la liberté qu’offrait le steampunk par rapport à du costume historique strict. Je ne savais pas encore que le sujet allait revenir sur la table lors de notre entrevue.

Le lundi suivant, j’ai recontacté Clémence par téléphone afin d’en savoir un peu plus sur l’association et sur le rôle qu’elle y joue.
Un fil conducteur : la passion pour le costume
Si elle a développé une certaine connaissance du costume, Clémence n’a pas de formation particulière dans ce domaine. Titulaire d’une licence en biologie, elle dit cependant avoir toujours été passionnée par tout ce qui tournait autour des loisirs créatifs. Sa passion pour les costumes a commencé en 2012. Elle et une de ses amies se fixent un défi : réaliser un costume historique pour la fête médiévale de Dinan. C’était le début d’une longue histoire : « J’ai commencé comme ça, et je n’ai jamais arrêté », dit-elle. Si son amie est devenue tisserande de profession, Clémence, avec deux autres amies, a fondé l’association et forum des Aiguilles et des Costumes.
« On était trois copines. On ne voulait pas faire dans une période ou un style précis ». La plupart des associations dédiées au costume sont centrées sur une époque ou un univers (médiéval, fantasy, steampunk,…). À la base, elles avaient commencé à en parler à une convention Japon-France en mars 2013. Dans la période qui a suivi, « On a testé les sorties costumées avec les copains pour voir si ça nous plaisait ». Un an plus tard, en avril 2014, l’association déposait ses statuts, ce qui répond à cette question.
Le but de l’association : accueillir tous types de costumes et d’univers, historique comme imaginaire
Quant à l’objet de ladite association, Clémence la veut « assez ouverte. On s’intéresse beaucoup à la technique et à ce qu’il y a autour du costume », notamment les accessoires divers (montres, bijoux, cravates… ). Comme j’ai pu le voir moi-même lors du pique-nique costumé, « l’association accueille un peu de tout ». Cela va des amateurs de reconstitution médiévale aux férus de fantasy, en passant par les cosplayers… Quant aux catégories d’âges : « On reçoit aussi bien des couples avec enfants que des personnes âgées » ; en d’autres termes, l’âge importe peu tant que la passion y est.
L’association peut aussi se centrer sur les costumes d’un univers précis si le public visé a une sensibilité particulière pour. Clémence évoque par exemple que « Dans les ateliers, on a déjà accueilli des enfants pour faire des costumes de Star Wars ».
Si l’association et forum des Aiguilles et des Costumes propose une approche historique, sa présidente considère que l’imaginaire a aussi son importance. On est dans une philosophie différente. Le costume historique demande beaucoup de rigueur, alors que le costume imaginaire permet d’être plus créatif. Mais là encore, l’association ne se veut pas cloisonnée. On peut très bien partir d’une base historique pour faire un costume purement fictionnel. À l’inverse, on retrouve des cosplayers qui auront revisité un personnage imaginaire sous un angle historique. Ainsi, on trouve des costumes de princesses Disney selon des codes historiques. Et en écoutant Clémence me faire cette remarque, je repense à Papy Vador, et à son autre cosplay : Wolverine version Steampunk. Les faits donnent raison à la présidente.
Événements à venir
Avant de prendre congé, je prends quand même connaissance des événements prévus pour la suite. L’activité de l’association est contrainte en raison du Coronavirus, comme pour la plupart des événements organisés. Cependant, un événement est d’ores et déjà annoncé pour le 1er novembre : un shooting photo prévu autour du thème pirates et steampunk. Une autre rencontre autour des pirates est annoncée pour le printemps 2021 à la citadelle de Port-Louis, à Lorient. L’époque visée sera plutôt le XVIIIe siècle. Pour le printemps dernier, l’association et forum des Aiguilles et des Costumes avait annoncé une tea party autour de l’imaginaire d’Alice au Pays des Merveilles. L’événement a été ajourné pour les raison que nous savons tous. Clémence espère pouvoir le proposer à nouveau en 2021, mais ne s’engage plus sur grand-chose.
En attendant, l’association continue ses activités, même de façon plus discrète. Elle le présente ainsi : « On alterne les périodes où on fait les costumes et les périodes où on les porte ». Et très logiquement, quand l’association ne propose pas d’événements, elle continue de réunir autour d’ateliers divers et variés. Tu pourras suivre tout cela sur leur page Facebook. En ce qui me concerne, ce n’est pas la dernière fois que je parle de l’association et forum des Aiguilles et des Costumes. Vu son rôle dans la culture de l’imaginaire, on n’a pas fini de se recroiser.